Qu'est ce que le marché transatlantique?

Les Etats-Unis et l’Union européenne négocient depuis des années, en toute discrétion, la mise en place d’un marché transatlantique. Prévu pour 2015, ce projet implique :
  • - la mise en place de nouvelles institutions transatlantiques - comme le Conseil Economique Transatlantique - qui agissent de façon non démocratique (pas de débat parlementaire, représentants non élus) pour influencer un nombre croissant de décisions politiques,
  • - l’harmonisation de nombreuses législations européennes et américaines aussi bien sur le plan commercial que sécuritaire,
  • - une diplomatie européenne de plus en plus alignée sur celle des USA,
  • - la mise en place d’une gouvernance mondiale basée sur les normes marchandes.
Concrètement, le marché transatlantique s’instaure à travers des dizaines d’accords politiques signés entre les Etats-Unis et l’Union européenne (et, pour certains d’entre eux, les parlements nationaux), lesquels concernent tous les domaines de la vie : travail, santé, alimentation… Ainsi : 
  1. Le marché transatlantique uniformise tout ce qui est nécessaire à la libre circulation marchande (biens, services, investissements…) d’un côté à l’autre de l’Atlantique, en choisissant de renforcer prioritairement la « libre-concurrence » et la compétitivité. Cela signifie que les marchés financiers et les firmes multinationales peuvent agir de plus en plus librement sur un espace géographique de plus en plus étendu.
  2. Par cette extension  géographique de la compétition économique, le marché transatlantique favorise les fusions/acquisitions d’entreprises, donnant aux firmes multinationales un contrôle de plus en plus grand de l’économie et de la finance (en 2005, les 500 plus grandes entreprises contrôlaient déjà la moitié du commerce mondial !) au détriment de nombreuses PME et d’indépendants.
  3. Le marché transatlantique menace l’autonomie politique des élus locaux. D’une part, il renforce le pouvoir financier des multinationales alors que certaines d’entre elles sont déjà aussi puissantes que des Etats (ainsi, Toyota est plus riche qu’Israël, Walt-Mart plus riche que la Grèce, Exxon plus riche que l’Autriche...). D’autre part, les accords transatlantiques font le choix de ne pas harmoniser les normes sociales, fiscales ou environnementales, instaurant ainsi une concurrence entre systèmes législatifs qui favorise les pratiques de dumping... au détriment des finances publiques, des conditions de travail, des salaires, de la santé et du bien-être général des populations.
  4. Renforçant le pouvoir des marchés financiers et des multinationales sur les pouvoirs politiques locaux, le marché transatlantique menace d’intensifier la privatisation des services publics et de la Sécurité sociale. L’accès universel à des services essentiels (enseignement, transports, culture…), le droit à des pensions dignes, des soins de santé accessibles, des allocations de chômage et des aides sociales minimum et inconditionnelles… Toutes ces conquêtes sociales solidaires, pour lesquelles des générations se sont battues, sont mises en péril. Le marché transatlantique appauvrira donc considérablement une large partie de la population, et accentuera d’autant plus la pression à la baisse sur les salaires et les conditions de travail.
  5. Le marché transatlantique ne répond pas par hasard aux exigences des firmes multinationales. En effet, les décisions politiques qui président à la création de ce marché sont le fruit direct du lobbying de puissantes firmes privées, qui agissent tantôt de façon officieuse, tantôt à titre d’experts officiels. La soumission d’une partie du monde politique aux intérêts privés est ici en cause (à titre d’exemple, près de 8% des parlementaires européens sont membres d’un lobby défendant les intérêts des multinationales : le Transatlantic Policy Network).
  6. Loin d’être un espace de liberté pour tous, le marché transatlantique prévoit d’importantes mesures sécuritaires : pour défendre le droit à la propriété intellectuelle, mais aussi pour surveiller plus étroitement les populations. Au nom de la lutte anti-terroriste, les Etats-Unis et l’Union européenne mettent en place des ententes judiciaires, pénales et policières qui contreviennent gravement aux principes même de la démocratie (droit à la vie privée, procès équitable, séparation des pouvoirs…). En définissant l’acte terroriste comme lavolonté de déstabiliser un Etat ou de l’influencer dans ses décisions, les législations sécuritaires transatlantiques peuvent être utilisées à des fins répressives contre les syndicats, ONG et mouvements sociaux. Avec, à la clé, des méthodes d’enquêtes spéciales, un fichage généralisé des populations et une remise en cause de certains droits élémentaires de la défense (comme l’interdiction d’accès à des pièces classées « secret défense »).
  7. Enfin, le marché transatlantique a également pour but d’étendre les logiques de marché compétitif à l’ensemble de la planète, accordant ainsi aux firmes multinationales un droit d’exploiter les populations et les ressources naturelles sans limites. Le marché transatlantique contribuera donc à l’aggravation de la pauvreté et des inégalités « Nord/Sud », tout en détériorant de plus en plus gravement les écosystèmes, la biodiversité, le climat. Se faisant, il multipliera les réfugiés climatiques, renchérira le prix des denrées de base et hypothèquera l’avenir et le bien-être des générations futures. 
  8. La dynamique transatlantique poursuit en l’élargissant le processus européen de marché unique, soutenu par les gouvernements nationaux qui occultent trop souvent leurs responsabilités en se cachant derrière les autorités européennes. Pourtant, les pouvoirs nationaux ne sont pas sans pouvoir, ainsi que le prouve leur veto à la décision de la Commission européenne d’autoriser l’importation en Europe de poulets américains traités à l’aide d’agents chimiques (poulets chlorés). Un projet que les Etats sont parvenus à arrêter, même si le bras de fer se poursuit au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce. Plus que jamais, le danger est grand de voir les rapports sociaux soumis à une logique de plus en plus marchande. 
Texte de la Plateforme contre le transatlantisme


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